En danse, la valeur n’attend pas le nombre des années ! En témoignent les « Baby ballerinas », terme inventé par l’écrivain et critique de danse anglais Arnold Haskell pour décrire trois jeunes danseuses des Ballets Russes de Monte-Carlo au début des années 1930 : Irina Baronova (1919 – 2008), Tamara Toumanova (1919 – 1996), et Tatiana Riabouchinska (1917 – 2000).
Enfants de la communauté russe en exil à Paris après la révolution de 1917, les trois jeunes filles ont été découvertes par George Balanchine en 1931 dans les classes qu’avaient ouvertes, pour survivre en exil, deux anciennes danseuses du Ballet impérial russe. Impressionné par leur incroyable talent et sachant que chacune d’elles avait une certaine expérience de la scène, celui qu’on n’appelait pas encore Mr B. les choisit alors pour intégrer une nouvelle compagnie fondée par René Blum et le colonel Wassily de Basil et dont il devait être le chorégraphe : les Ballets Russes de Monte-Carlo.
Au cours de leur première saison avec la compagnie, au printemps 1932, Irina Baronova et Tamara Toumanova avaient 12 ans, et Tatiana Riabouchinska avait 14 ans ! Et malgré leur grande jeunesse, elles ont toutes les trois interprété tous les premiers rôles dans les ballets du répertoire de la compagnie : le Tricorne, la Symphonie Fantastique, Gisèle, Coppelia, le Mariage d’Aurore, etc.
Tamara Toumanova a connu ensuite de grands succès en créant des rôles de quatre ballets de Balanchine — Cotillon, La Concurrence, Le Bourgeois Gentilhomme et la Suite des Danses — mais Irina Baronova et Tatiana Riabouchinska ont également été applaudies et acclamées dans les grands rôles du répertoire. L’extrême jeunesse et la perfection technique de ces « baby ballerinas » leur ont valu une renommée non seulement à Monte-Carlo, en France et en Angleterre, mais jusqu’aux Etats-Unis.
Et, comme si leur destin était décidément lié, toutes trois sont passées par le cinéma et, plus précisément, par Hollywood ! Irina Baronova est apparue dans 4 films dont Nijinsky avec Jeremy Irons et Tatiana Riabouchinska a travaillé avec les studios Disney pour Fantasia (où elle a notamment inspiré les mouvements du fameux Hippopotame… alors qu’elle n’en avait pas du tout la corpulence !) et pour La Boîte à musique où elle apparait à l’écran avec son partenaire David Lichine. Mais c’est Tamara Toumanova qui a le plus tourné avec de belles réalisations comme Invitation à la danse de Gene Kelly (1956), Le Rideau déchiré d’Alfred Hitchcock (1966) et La Vie privée de Sherlock Holmes de Billy Wilder (1970).
Un incroyable destin pour ces trois « baby ballerinas » qui ont décidément fait du chemin !